Par Francis Pelletier
© copyright 1995 MOSARCA
Cet article a été publié dans le magazine MOS 139
Le HD-CD trouve son origine dans le besoin qu'ont exprimé les grandes
firmes de l'électronique grand-public d'une seconde génération
de Compact Disc capable d'offrir une capacité de stockage élevée
pour diffuser des programmes de vidéo numérique compressée
de très haute qualité. En réponse, on a vu apparaître
le MM-CD de Philips/Sony et le SD (Super Density Disc) de Matsushita, Toshiba
et autres. Après une guéguerre de communiqués, les
deux clans ont entamé des discussions en septembre dernier en vue
de parvenir à un standard commun. Si quelques points de convergence
existent, tout est loin d'être réglé. Le premier produit
en lice est le DVD ou Digital Video Disc qui permet au grand-public de visionner,
à partir d'une seule face de HD-CD, jusqu'à deux heures et
demie de vidéo MPEG-2 accompagnée d'un son multicanaux et
de sous-titres multilingues (MOS N°131 et pages 37/40 dans ce même
numéro). On relira le DVD à partir d'un lecteur de salon qui
ressemblera à un lecteur de CD-I ou de Video-CD et l'image s'affichera
sur un téléviseur couplé à une chaîne
haute fidélité. Le DVD pourra également être
lu sur des micro-ordinateurs équipés d'un lecteur adapté
et d'une carte de décompression à la norme MPEG-2. Les industriels
comptent proposer une version ROM de ce nouveau format de disque aux éditeurs
de programmes informatiques et de jeux vidéo. Il est prévu
que ces nouveaux lecteurs de DVD et de HD-CD-ROM relisent également
les disques actuels de simple densité et puissent s'adapter à
des médias simple et double couche.
Au départ, dans chaque clan, on prévoyait de lancer le DVD
à la mi-96 puis à la fin 96. Aujourd'hui, il semble qu'il
leur faudra une année supplémentaire, à moins d'arriver
rapidement à un consensus, non seulement entre les deux clans concernés
même aussi avec les industriels de l'informatique. Par prudence, mieux
vaut tabler sur un lancement effectif en 1997 si rien n'entrave la suite
des événements actuels. Les premières versions des
lecteurs de DVD ou de HD-CD-ROM seront destinées à l'exploitation
de programmes préenregistrés avec, vraisemblablement, la possibilité
d'interagir comme c'est aujourd'hui le cas avec le CD-I ou d'autres consoles
intelligentes à base de CD-ROM. Pour que le lancement ne se fasse
pas dans un désert de programmes, les industriels comptent élaborer
un catalogue de titres préenregistrés réalisé
à partir du fonds cinématographique des sociétés
qui ont adhéré à ce nouveau support. C'est le cas de
Time-Warner mais également de Sony et de Philips. Malgré ces
précautions, on doit envisager sérieusement la possibilité
que le marché du DVD ne se forme pas aussi vite que le prévoient
certains de ses promoteurs. Il faudra bien à notre avis compter deux
ans avant de faire accepter ce nouveau produit à un public large.
La conjoncture économique va s'en mêler mais aussi le niveau
des prix pratiqués et le nombre de titres proposés sur le
marché. Par contre, le HD-CD-ROM pourrait connaître plus vite
un relatif succès si les industriels de l'informatique adoptent ce
nouveau média. Il est bien en phase avec les besoins accrus en capacité
de stockage pour la diffusion de grandes bases de données et le développement
de nouveaux produits. De plus, le prix des premiers lecteurs de HD-CD-ROM
sera certainement mieux admis dans les milieux informatiques que sur le
marché de l'électronique grand-public.
Pour être exhaustif, il faut également toucher un mot de l'environnement
de fabrication des DVD et des HD-CD-ROM. Les matriceurs et les presseurs
indépendants devront mettre à niveau leur matériel
pour répondre à de nouvelles exigences techniques. Les concepteurs
de programmes devront trouver les bons outils de production, tant matériels
que logiciels, afin de réaliser des disques se conformant à
de nouvelles spécifications. De ce côté aussi, il va
falloir donner du temps au temps. Le CD-ROM tel qu'on le connaît aujourd'hui
a encore quelques petites années devant lui avant de céder
la place à un cousin de haute densité. Il en est de même
pour le CD-WORM et le CD-E. Le HD-CD WORM devrait avoir, s'il est réellement
disponible à la fin de l'année 96, trois ans devant lui avant
de se voir dépasser par le HD-CD-E. Les industriels ont cette courte
période pour le banaliser avant de généraliser l'usage
des enregistreurs/lecteurs multifonctions (CD-WORM/ CD-E) dans les plates-formes
informatiques à base de micro-ordinateurs. Le premier marché
visé est en effet celui de l'informatique où les fabricants
pourront se permettre de vendre les enregistreurs/lecteurs de HD-CD-WORM/HD-CD-E
à un prix élevé, la prime de la nouveauté étant
justifiée par les capacités de stockage offerte. Dans un second
temps, les fabricants déclineront ces appareils professionnels en
des appareils grand-public pour l'enregistrement de la vidéo numérique
ou d'informations reçues au travers du câble ou au travers
de réseaux de télécommunications. Quelles que soient
les échéances, la marche en avant vers la haute densité
est inéluctable. Et le HD-CD sous toutes ses formes représente
une aubaine pour l'industrie électronique avec les renouvellements
de matériels qu'il entraîne. Entre matériels et média,
les enjeux se comptent, à long terme, en milliards de dollars.
Par Francis Pelletier
© copyright 1995 MOSARCA
Cet article a été publié dans le magazine MOS 139